Qu’est-ce qu’un IUT ? Interview de Gilles Danos, Chef du département Gestion Logistique et Transport (IUT d’ Alençon)

02/03/2017 8 minutesPartager sur

interview apprentissage à l'iut

Pouvez-vous présenter l’IUT d’Alençon ?

Je suis enseignant au département gestion, logistique et transport de l’IUT (Institut universitaire de technologie) d’Alençon depuis sa création en 1993. Lorsque nous avons démarré, il n’existait qu’un DUT en 2 ans en 1999, nous avons créé le DUT en 1 an ou DUT en année spéciale qui est un peu particulier. En 2003, nous avons mis en place une licence professionnelle en logistique de distribution, qui à la rentrée 2017 s’appellera GOAL, Gestion et Organisation des Activités Logistiques. Le nom et le contenu sont légèrement modifiés pour mieux s’adapter aux lieux d’alternance de nos élèves. Le e-commerce ne justifie pas d’une logistique particulière, un entrepôt va traiter aujourd’hui tous les formats de magasins de la superette au supermarché en passant par les ventes internet.

À l’IUT, il y a plusieurs types d’enseignants, les enseignants-chercheurs, les enseignants du secondaire détachés dans l’enseignement supérieur (ce qui est mon cas) et les vacataires qui sont des professionnels qui interviennent.

Quelle est la différence entre un IUT et une université ?

Dans une université, il suffit normalement d’avoir le bac. A l’IUT, en théorie, vous êtes recruté sur dossier. Quand vous postulez, même s’il y a énormément de chances qu’on vous dise oui, il y a certains cas où on ne vous acceptera pas. Concrètement, ceux qui ont vraiment un niveau très faible ou des problèmes de comportement avérés, ceux qui ont redoublé plusieurs fois, etc… ne seront pas acceptés. Par contre, un jeune qui revient après avoir fait des petits boulots pour faire notre année spéciale, même avec un dossier pas très avantageux, nous le recevons en entretien et selon sa motivation, nous lui donnerons sa chance. On entend souvent que les IUT sont élitistes, ce qui n’est pas vrai. À l’IUT, les cours magistraux, les TD, les TP sont obligatoires, la présence de l’élève est requise et nous y veillons scrupuleusement alors qu’à la fac, les élèves font un peu ce qu’ils veulent. Depuis 1993, le fonctionnement des IUT a beaucoup évolué suite à un certain nombre de réformes. Nous avions l’article 33, un budget à part, des moyens pour fonctionner comme la taxe d’apprentissage, car nous sommes assez proches des entreprises ce qui peut être la différence avec l’Université.

Pour moi, l’IUT a un statut particulier. Nous avons des diplômes nationaux, un programme pédagogique national là ou une université peut avoir sa propre licence. Les différents IUT se rencontrent régulièrement et se connaissent. Nous mettons en place les programmes pédagogiques nationaux de façon paritaire à savoir avec les enseignants et les professionnels du secteur. Nous tenons à cet aspect national, pour donner une visibilité au diplôme, ce qui me parait important.

Les IUT sont-ils plus efficaces que les universités pour trouver un job ?

Si l’on s’attache aux statistiques, oui. Les dernières statistiques de l’université de Caen révèlent que 88% des DUT et 92% des licences professionnelles sont en emploi 30 mois après leur sortie alors qu’ils ne seraient que 60% dans une licence généraliste.

Pouvez-vous présenter le DUT Gestion Logistique et Transports ?

Notre IUT a quatre départements, le plus ancien est GMP (Génie mécanique et productique) créé en 1988, GLT (Gestion Logistique et Transport) en 1993, puis QLIO (Qualités Logistiques Industrielles et Organisation) qui est à la fois concurrent et complémentaire avec GLT. Enfin, nous avons le département « Carrières sociales » avec option « gestion urbaine » ou « service à la personne ». Il y a entre 600 et 650 étudiants à l’IUT. Quand vous faites un DUT GLT, vous avez ce que l’on appelle les équivalences, des attestations de transport de marchandises, de voyageurs et commissionnaires de transport. Ces attestations sont indispensables pour ceux qui souhaiteraient se mettre à leur compte.

L’IUT est un compromis entre le lycée et l’université, c’est à la fois le lycée, car il y a de l’encadrement et à la fois la faculté car il y pas mal d’autonomie. Pour beaucoup de jeunes, la faculté c’est une trop grande liberté. Nous avons quand même une organisation moins pesante que le lycée.

Quelles sont les formations de l’IUT d’Alençon ?

Normalement un DUT dure deux ans, mais il y a beaucoup d’exceptions. Par exemple, chez nous il y a le DUT en un an. Toute personne possédant un bac +2 validé ou non et qui souhaite se réorienter peut venir faire notre DUT en un an. Cette section a de petits effectifs, cette année ils sont 18 et l’an dernier, ils étaient 15. Dans cette section, il peut y avoir des jeunes en réorientation suite à un échec, mais aussi des gens en reprise d’étude.

Nous avons des enseignements généraux comme l’anglais avec possibilité de passer le TOEIC, une deuxième langue (allemand, espagnol, italien, chinois) et la communication. Ensuite, il y a les cours de spécialité avec les modes de transport, la présentation de la logistique, la gestion d’entrepôt, la gestion de production. En fin de première année, chaque élève doit faire un stage de 3 semaines de découverte. La deuxième année, il y a un stage plus long, de 9 semaines où là on attend que l’étudiant ait une mission et fasse un rapport de stage plus poussé.

Les métiers de la logistique sont-ils des métiers d’avenir ?

C’est l’évolution de l’économie qui nous dicte les métiers d’avenir. Par exemple, nous avons beaucoup de jeunes qui travaillent dans le monde de l’automobile qui a supprimé beaucoup de postes à la production pour diverses raisons (robot, délocalisations, etc…). En revanche, il faut toujours faire venir les pièces entre les usines et faire revenir les voitures quand elles sont fabriquées ailleurs, et ça, c’est de la logistique. Donc globalement, même si on fabrique moins en France, le logisticien a toujours autant de travail voire plus. La logistique, ce sont des métiers très transversaux, il y en a dans tous les secteurs.

Quand un jeune veut faire de l’alternance, il faut savoir que ça fonctionne à travers les OPCA. Il y a par exemple l’OPCA de la métallurgie, de l’agroalimentaire, des métiers de transformation de la viande. Quand on parle des métiers de la viande, les gens pensent à la personne qui désosse la viande, ils ne voient pas le jeune qui va gérer les flux entre le moment où on va chercher la bête, qu’elle est amenée à l’abattoir, il y a de la logistique partout.

Est-ce que les filles ont leur place ?

Bien sûr, au niveau local nous avons eu jusqu’à plus de 50% de filles, mais à mon grand désespoir ce n’est plus le cas depuis quelques années. En fait, le département « carrière sociale » attire toutes les filles. Alors que selon moi, les débouchés et perspectives professionnelles entre GLT et Services à la personne sont énormes et GLT est beaucoup plus attractif. Les métiers de la GLT sont des métiers qui bougent où l’on ne s’ennuie pas, ils sont évolutifs et il y a même des possibilités de travailler à l’étranger ce qui est un vrai boosteur de carrière. Les jeunes apprennent aussi à encadrer, à avoir des responsabilités de manager. Les tâches quotidiennes vont vraiment être variées (gestion des stocks, des approvisionnements, des transports, des entrepôts, des productions).

L’alternant, un profil idéal pour les entreprises ?

Tout dépend à quel niveau est faite l’alternance et quelle est l’entreprise. Certaines entreprises ne souhaitent qu’une chose : un jeune motivé pour travailler. Il y a aussi des entreprises qui ont des prérequis comme savoir parler anglais, utiliser excel ou certaines connaissances en logistique et transports. De manière générale, dans les entreprises, les tuteurs sont très impliqués. L’entreprise aime aussi l’alternance, car parfois cela leur permet de « façonner » un jeune à leur manière dans le cadre d’un pré-recrutement.

Comment se déroule l’alternance à l’IUT d’Alençon ?

Il y a trois diplômes ouverts à l’alternance. Il y a la licence professionnelle, où il y a peu d’heures de cours. Les élèves sont 16 semaines à l’IUT en début d’année universitaire puis 8 semaines en entreprise. À partir de fin février jusqu’à fin août, ils sont 100% dans l’entreprise.

En licence le rythme est particulier puisque les jeunes ont des semaines complètes à l’IUT, le rythme est de 6 semaines à l’IUT 3 semaines en l’entreprise puis 6 semaines IUT, 6 semaines entreprise et enfin 6 semaines IUT et 26 semaines en entreprise.

En année spéciale, c’est assez différent. Il y a 25 semaines à l’IUT avec un rythme 3 jours IUT, 2 jours entreprise. Puis tout le reste est en entreprise.

L’alternance est peut-être un peu plus difficile que le reste, mais vous êtes gagnant sur tous les plans et vous êtes rémunéré au minimum à 55% du smic selon l’âge.

Avez-vous un exemple de réussite d’alternance ?

J’ai un jeune qui avait fait un BTS technico-commercial, et qui est venu faire la licence professionnelle logistique alternance à l’IUT. Son BTS est orienté sur la vente automobile, et il a trouvé une alternance chez un équipementier automobile. Son tuteur a d’ailleurs été un de mes anciens étudiants. Le jeune à découvert les « coulisses » de l’automobile et il s’y intéressait beaucoup. Aujourd’hui, il est toujours dans l’entreprise, on lui a proposé pour commencer un CDD, puis un deuxième et l’entreprise voudrait le passer en CDI, mais le jeune voudrait d’abord avoir une expérience à l’étranger. Globalement, les taux de réussites en alternance des 3 diplômes sur les 3 dernières années sont les suivants :

2014 : DUT en 2 ans : 77% Année spéciale : 75 % Licence : 80%

2015 : DUT en 2 ans : 90% Année spéciale : 70 % Licence : 93%

2016 : DUT en 2 ans : 93% Année spéciale : 78 % Licence : 76%

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